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Rangaku
19 octobre 2020

L’année 1826 marque une nouvelle étape dans la

 L’année 1826 marque une nouvelle étape dans la vie de Yôan. Le 15 janvier, Genshin玄真 s’installe à Fukagawa 深川(un quartier de l’actuel arrondissement de Kôtô-ku 江東区 à Tôkyô). Le 15 février, Yôan est promu médecin attitré de Ryôsei 涼晴, la mère de MATSUDAIRA Naritaka 松平斉孝 (gouverneur, 大名daimyô, du domaine de Tsuyama 津山藩Tsuyama-han) et de son fils hériter MATSUDAIRA Naritami 松平斉民. S’il est déjà défrayé de ses dépenses lors d’achats de médicaments, il peut désormais porter un kuro-habutae 黒羽二重, vêtement qui s’apparente à une veste noire, frappé du blason familial, 家紋 kamon, du clan MATSUDAIRA, identique à celui des TOKUGAWA 徳川, les trois feuilles d’asarum caulescens stylisées, mitsuba aoi(三つ葉お葵).

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Au printemps (en mars) 1826, les membres de la délégation hollandaise de Dejima menée par le directeur de la factorie Johann Wilhelm de STURLER arrivent à Edo. Ils sont accueillis à l’étape d’Ômori 大森 (arrondissement d’Ôta 大田区 Ôta-ku, Tôkyô) par deux ranpeki daimyô  蘭癖大名 (savants entichés de « hollandisme ») : SHIMAZU Shigehide 島津重豪, du domaine de Satsuma  薩摩藩 Satsuma-han (actuelle préfecture de Kaghoshima 鹿児島県 Kagoshima-ken) et son fils adoptif OKUDAIRA Masataka 奥平昌高, du domaine de Nakatsu 中津藩 Nakatsu-han (actuelle préfecture d’Ôita 大分県 Ôita-ken). Puis, c’est au tour de KATSURAGAWA Hoken 桂川甫賢 et de Yôan de venir les saluer à Shinagawa 品川 (arrondissement de Minato 港区 Minato-ku, Tôkyô). Sitôt arrivés à l’auberge Nagasaki-ya 長崎屋 (leur lieu de résidence à Nihonbashi-Hongokuchô  日本橋本石町, actuel arrondissement de Chûô  中央区 Chûô-ku), les voyageurs reçoivent la visite de Hoken, KAMIYA Gen’nai 神谷源内 du domaine de Nakatsu, ISEYA Shichizaemonn  伊勢弥七左衛門, un commerçant (pâtisserie japonaise) d’Edo, et ÔTSUKI Gentaku  大槻玄沢. 

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On retiendra, parmi les 57 personnes de la délégation hollandaise, les noms de : Philipp F. B. von SIEBOLD, le médecin attaché à la factorie ; Heinrich BÜRGER, le pharmacien (médecin et botaniste) qui accompagnait SIEBOLD et fit pour l’heure office de secrétaire ; NAMURA Hachitarô 名村八太郎, l’interprète particulier de STURLER (et de SIEBOLD) ; SUENAGA Jinzaemon 末永甚左衛門 et IWASE Yajûrô 岩瀬弥十郎, les interprètes de premier et second rangs ; KAWAHARA Keiga  川原慶賀, peintre de Nagasaki ; KÔ Ryôsai  高良斎 et NINOMIYA Keisaku 二宮敬作, deux médecins du Narutaki-juku「鳴滝塾」, l’école privée et dispensaire de SIEBOLD à Nagasaki. Du côté japonais, outre Yôan, cinq autres rangakusha participaient à la réunion : KATSURAGAWA Hoken, ÔTSUKI Gentaku 大槻玄沢, YOSHIO Chûjirô 吉雄忠次郎, TAKAHASHI Kageyasu 高橋景保 et ISHIZAKA Sôtetsu 石坂宗哲. 

Quelques notes du journal de SIEBOLD à propos de ses compagnons : - Sujenaga Sinsajemon (SUENAGA Jinzaemon), bonnes connaissances scientifiques, la soixantaine, toujours alerte ; - Iwase Jasiro (IWASE Yajûrô), un peu plus jeune que son collègue, lui ressemble physiquement ; - Namura Hatsutaro (NAMURA Hachitarô), connaissances étendues, possède le hollandais et le chinois, le plus accompli parmi les interprètes ; - trois samuraï de rang modeste : un Funa-ban 船番 (fonctionnaire chargé de l’inspection des navires hollandais à l’entrée du port de Nagasaki), et deux Tsjo-si  町司 chô-shi (fonctionnaire de Nagasaki, en charge de la sécurité, l’équivalent d’un officier de police) ; - KAWASAKI Genzô川崎源藏, attaché de justice dépendant du bugyô  奉行 magistrat-gouverneur de Nagasaki ; - Ko Riosai (KÔ Ryôsai), connaissances étendues de la flore japonaise, du chinois comme du néerlandais, fidèle et dévoué ; - Tojoske 登與助 Toyosuke (= KAWAHARA Keiga), habile peintre (notamment de plantes), mais aussi initié à la peinture occidentale (portrait et paysage) ; - Benoske  辨之助 Ben’nosuke (ou Gen’nosuke 源之助 ?) en charge des herbiers et de la taxidermie, et Komaki 熊吉 (Komakichi 駒吉 ?) [tous deux non identifés] ; - Keisaku (NINOMIYA Keisaku), Sjogen ショーゲン [non identifié] et Keitaro ケイタラウ (NISHI Keitarô  西慶太郎, interprète de Nagasaki ?), trois de ses élèves.

[d’après KURE Shûzô 呉秀三,『シーボルト江戸参府紀行』Shîboruto Edo sanpu kikô, 駿南社, 1928.]

Le second jour, SIEBOLD reçut de plusieurs médecins d’Edo de nombreux échantillons de plantes séchées, parmi lesquels ceux de Hoken et de Yôan étaient, note-t-il, les plus remarquables. Les entretiens se déroulant en néerlandais, il put aussi apprécier les connaissances tant linguistiques que scientifiques de Yôan qui, de son côté, note en subsance … SIEBOLD, très tôt orphelin a fait ses études en Allemagne. Son savoir couvre bien des domaines, de la musique à l’histoire naturelle, et sa fréquentation ne peut être que d’un grand profit...  Sans doute Yôan a-t-il aussi remarqué l’accent particulier de SIEBOLD lorsqu’il s’exprimait en néerlandais et il en fait un Hollandais du sud ... ce que prétendait l’intéressé lui-même pour donner le change à son accent allemand, sa véritable nationalité révélée lui aurait interdit l’accès à Dejima où seuls les Hollandais étant admis. Siebold souhaitait prolonger son séjour à Edo et KATSURAGAWA Hoken, qui partageait son désir, s’entremis auprès des autorités suggérant que sa présence permettrait la traduction (pour le shogun) d’un ouvrage conservé dans les dépôts de livres du bakufu : traité sur les fleurs illustré de remarquables planches en couleurs, le célèbre florilège Phytanthoza iconographia du botaniste et apothicaire allemand Johann Wilhelm WEINMANN [voir infra, Shokugaku dokugo『植学獨逸語』, Liste des ouvrages utiles à la botanique parvenus au Japon]. La prolongation du séjour ne fut pourtant pas autorisée et du reste STURLER, le directeur de la factorie, n’y tenait pas non plus. L’avis de refus arriva le 16 mai et le 18, la délégation hollandaise reprenait le chemin de Dejima.

Peu avant son départ, le 12 mai, SIEBOLD, en remerciement des échantillons de plantes que lui avait préparés Yôan, lui offrit un microscope (qui lui sera précieux pour ses travaux sur les insectes [cf. supra]), ainsi que deux ouvrages illustrés de botanique :

I- Natuurkundige uitspanningen, behelzende eene beschrijving, van meer dan vier hondert Planten en Insekten, keurig naar het leven afgebeeld. Door J. Baster. Vernieuwde Hollandsche Uitgave. Eerste Deel (et Dweede Deel). Te Utrecht, bij O. J. van Paddenburg en O. J. van Dijk, Boekdrukkers en Boekverkoopers. C’est une copie (deux volumes, sans date d’édition) du célèbre ouvrage du médecin et naturaliste hollandais Job BASTER dont le titre original est : Natuurkundige uitspanningen, behelzende eenige waarneemingen, over sommige Zee-Planten en Zee-Insecten, benevens derzelver Zaadhuisjes en Eijernesten. Door Job Baster, Doctor in de Medicynen, lid der Keizeryke Academie, en der Koninglyke Engelse, en Hollandse Maatschappyender Wetenschappen. Eerste Deel (et Tweede Deel). Te Haarlem, By J. Bosch, 1762. Publiés entre 1759 et 1765, ces deux volumes, de trois parties chacun, sont illustrés de 29 planches en couleurs ; les gravures sont du peintre et dessinateur hollandais Cornelis van NOORDE.

  La copie offerte à Yôan porte en page d’ouverture une dédicace, datée du 12 mai 1826, de SIEBOLD à Woedagawa Jooan Geneesheer en Natuuronderseker te Yedo (= Udagawa Yôan, médecin et naturaliste à Edo). La page 5 de l’Introduction est titrée Natuurkundige uitspanningen, behelzende eenige waarnemingen, over sommige Zee-Planten en Zee-Insecten, benevens derzelver zaadhuisjes en eijernesten.

II- Anleitung zur Kenntniß der Gewächse. Zweite, ganz umgearbeitete Ausgabe. Dritter Theil. (Mit zehn Kupfertafeln.) Halle. Bei C. A. Kümmel. 1817. Tl. 1 Vom Bau und der Natur der Gewächse, 1817. Tl. 2. Abt, 1. Uebersicht der Gewächsreichs nach natürlichen Verwandtschaffen, 1817. Tl. 2. Ibd. 1818. Ouvrage en trois parties du médecin et botaniste allemand Kurt Polykarp Joachim SPRENGEL (première publication 1802-1804, seconde édition 1817-1818). Comme pour le précédent, la page d’ouverture comporte une dédicace de SIEBOLD : Tod Gedachtnis / aan mijnen leergierigen / Vriend Woedagawa Jooan / Dr. von Siebold 1826 (= En souvenir de mon ami épris d’études Udagawa Joan). Yôan a laissé un manuscrit, Supurengeru goi『スプレンゲル語彙』(Vocabulaire de Sprengel), où il dresse une liste de 685 mots allemands (classés par ordre alphabétique), tirés de cet ouvrage avec en regard : parfois la traduction en hollandais, parfois le mot latin correspondant (mis entre parenthèses), parfois le sens en japonais, etc. Exemples (avec rajout du mot français correspondant) :

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Yôan s’inspira également du livre de SPRENGEL, notamment en traduisant la première partie relative à la classification qui ouvre le volume 2, pour rédiger son manuscrit, le Hyakkô-fu 『百綱譜』 (date inconnue), où sont répertoriées 1 600 plantes japonaises classées en 100 familles ; notée selon l’ordre alphabétique, la liste des noms de plantes (souvent accompagnés d’une lecture en kana), propose aussi les noms japonais et chinois correspondants. Le revers de la couverture porte la mention manuscrite : 

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 Un autre de ses manuscrits, le Hyakkô-zenfu『百綱全譜』(4 livrets, 1838-39) comprend 685 rubriques ; les titres allemands, classés par ordre alphabétique (A, B, C, D, …), sont traduits en latin et en japonais. Il s’agit de la plus ancienne traduction “allemand-japonais” connue.

  L’ouvrage de SPRENGEL a grandement servi à Yôan pour ses travaux de botanique, notamment lors de la rédaction du (Rigaku nyûmon) Shokugaku keigen『(理学入門)植学啓原』(1831). Les sources auxquelles il s’est référé ne sont pas explicites, mais de notables similitudes avec le Seimi kaisô 『舎密開宗』 laissent à penser que certaines sont communes aux deux ouvrages. Par exemple, concernant le métabolisme, la description du「遠近の成分」du Shokugaku keigencorrespond au chapitre 48 du Seimi kaisô, intitulé mizu no bunri「水の分離」(décomposition de l’eau, hydrolyse). 

  D’autre part, SIEBOLD possédait à Dejima un exemplaire du Synopsis Methodica Fungorum (1801), ouvrage du philosophe, médecin, naturaliste et mycologue sud-africain (d’origine hollandaise et allemande) Christia(a)n Hendrik PERSOON, que Yôan a probablement vu, ou consulté, puisqu’il le cite dans une lettre adressée à ITÔ Keisuke 伊藤圭介. Le nom de PERSOON apparaît d’ailleurs dans l’introduction du Shokugaku keigen, où l’on relève également le nom du philosophe, médecin, naturaliste et botaniste italien, Andrea CESALPINO, inventeur de la première méthode de classification des plantes dont la somme en onze volumes, De Plantis (1583), aura une forte influence sur LINNÉ et John RAY, ainsi que le nom du médecin, pharmacien et botaniste Carl Ludwig WILLDENOW, auteur du Linnaei species plantarum [...] editio quarta (1798-1826, 6 volumes) qui est une version améliorée et augmentée de nombreuses nouvelles descriptions de la 4e édition du Species Plantarum (1753) de LINNÉ [pour les titres complets des ouvrages de CESALPINO, LINNÉ et WILLDENOW, cf. infra (*)].

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(*) : titres complets des ouvrages de CESALPINO, LINNÉ et WILLDENOW :

- CESALPINO :

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- LINNÉ :

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- WILLDENOW :

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  Il faut également mentionner qu’en 1839, ITÔ Keisuke  伊藤圭介 fit paraître les 3 volumes du Taisei honzômeiso『泰西本草名疏』(Noms des Plantes de l’Occident), où pour la première fois est abordé au Japon le système de nomenclature occidentale développée par Carl von LINNÉ. Cette traduction basée sur le Flora Iaponica (1784) de Karl Peter THUNBERG, a par ailleurs stimulé Yôan dans ses propres travaux.

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